La CDU n'aura pas régné plus de cinq ans dans le "fief" de la social-démocratie
Par Michel Verrier, lundi 10 mai 2010 à 00:28 :: partis :: permalien #160
Pâle, Jürgen Rüttgers, ministre-président démocrate chrétien de Rhénanie du nord Westphalie (NRW), encaissait difficilement sa défaite hier soir. Avec 34,3% des suffrages selon les projections à vingt heures, la CDU chute de 10 points sur son score de 2005. Une vrai débâcle! Ses allié libéraux ne bougent guère avec un résultat de 6,7% des voix. Pas de quoi faire un majorité. Le gouvernement du Land de NRW est donc remercié,après cinq ans d'exercice.
Rüttgers a fait les frais d'une suite de mini-scandales locaux qui ont entamé son image en NRW. Son opposition à la réforme scolaire que proposent les verts et le SPD pour mettre fin à la sélection précoce des élèves dés le primaire, a également joué un rôle décisif dans le choix des électeurs du Land. Selon une étude du comportement de l'électorat, les enjeux régionaux seraient restés déterminants dans leurs choix, ce dimanche.
Mais les querelles permanentes affichées entre les libéraux et les démocrates chrétiens au sein du gouvernement d'Angela Merkel à Berlin n'ont pas contribué non plus à la mobilisation des électeurs de la CDU.
Au final la défaite marque d'autant plus Rüttgers qu'il était apparu il y a cinq ans comme l'homme de l'avenir, parvenant enfin à déloger la social démocratie rhénane du pouvoir après 40 ans de règne -depuis 1966.
Sa victoire semblait donner le coup de grâce au gouvernement rouge-vert de Gerhard Schröder à Berlin, et marquer la fin d'une époque. L'alliance des sociaux démocrates et des écologistes faisait figure de modèle dépassé. Une nouvelle ère semblait s'être ouverte pour les démocrates chrétiens et les libéraux, de la Rhénanie du nord à Berlin, à la chancellerie. Le coup était si dur, que l'ex chancelier Schröder décida au lendemain de la défaite de demander au président de la République de dissoudre le Bundestag, afin de convoquer des élections anticipées -Joschka Fischer, leader des verts et ministre des affaires étrangères de Schröder, regrettera que le chancelier n'ait pas voulu aller normalement jusqu'à l'échéance de son mandat. Estimant qu'il en aurait tiré les fruits, un an plus tard. Ses mesures sociales contestées ayant eu leurs effets, selon lui, sur la diminution du chômage
Mais Schröder estimait impossible de continuer à gouverner à Berlin, après avoir reçu une telle claque en NRW. Il jugeait indispensable de nouvelles élections fédérales, pour reconquérir la légitimité politique indispensable à la mise en oeuvre de sa politique de réformes « sociales » -la réduction de l'indemnisation du chômage notamment.
Il fut battu par Angela Merkel. De peu.
Il est probable que la chancelière ne fera pas la même démarche que lui et restera à son poste Mais la défaite de Rüttgers est d'autant plus significative qu'elle a lieu dans ce décors de tournant raté pour les démocrates chrétiens, dans l'histoire du premier Land allemand.
Cinq ans plus tard, déjouant les conclusions « définitives » voilà la coalition rouge-verte -le modèle supposé dépassé - de retour. Même si les deux partis ne peuvent constituer une majorité à eux seuls -il manquerait un siège de député-, ils devancent avec 46,6% des suffrages la coalition de Rüttgers, qui rassemble seulement 41,3% des voix.
C'est la CDU cette fois -et les libéraux- qui paraissent dépassés. Ils n'auront tenu le Land de NRW que cinq ans seulement. Après six mois de gouvernement à Berlin, le gouvernement Merkel enregistre sa première défaite. La chancelière va certainement en sentir les effets au sein de son propre parti. Sa « stratégie » de ces derniers mois, face à la crise de l'euro notamment, est déjà mise en cause. Roland Koch, ministre président démocrate chrétien conservateur en Hesse, n'a pas hésité à dire tout le mal qu'il pensait de ses hésitations -par temps de crise, le temps perdu c'est de l'argent qui flambe.
On évoque son nom pour remplacer Wolfgang Schäuble, le ministre des finances actuels d'Angela Merkel, malade -il a été hospitalisé d'urgence hier soir à Bruxelles alors qu'il assistait à la réunion des ministres des finances européens. A l'opposé deRroland Koch, Jürgen Rüttgers lui est un porte parole de l'aile sociale de la CDU.
Certains mauvais esprits dans son propre camps, commentaient d'ailleurs sa défaite hier soir en soulignant qu'il avait voulu se donner un profil plus SPD que le SPD lui même. « Ajoutez à cela la politique multi-culturelle mise en oeuvre par son ministre de l'intégration Armin Lachert, poursuivait-on. Une telle stratégie ne permet pas de re-mobiliser l'ensemble de l'électorat de la CDU" et décourage notamment son aile la plus conservatrice. La défaite de Rüttgers met probablement sa carrière politique entre parenthèse, comme son rôle de contestataire de la politique libérale d'Angela Merkel au sein de la démocratie chrétienne. La chancelière, quant à elle a totalement perdu son pari d'il y a trois mois: conserver la Land de Rhénanie du nord Westphalie. Elle avait déjà perdu sa stature de miss Europa dans l'Union européenne ces dernières semaines, avec l'affaire de la crise grecque, la voilà ébranlée directement sur la plan de sa politique à Berlin.
Voir mon billet Merkel et la Grèce, pocker gagnant ou perdant?
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