Importer le lait comme le pétrole?
Par Michel Verrier, dimanche 1 juin 2008 à 11:22 :: économie :: permalien #55
"Les points de vue diffèrent: la chute du prix du lait c'est bon pour nous, les consommateurs, et durs pour les paysans", la vidéo ci-dessous résume les enjeux de la grève.
Les laiteries achètent actuellement le litre entre 25 et 35 cent à la ferme, contre 42, 43 cent jusqu'en février dernier. Leurs incitations à produire plus et la hausse de 2,5% des quotas laitiers européens aurait abouti à une « surproduction » d'1 millions de tonnes de litre environ, qui a fait sévèrement chuter les cours. Au tarif actuel, les paysans qui mènent le conflit assurent qu'ils ne peuvent pas vivre décemment. La hausse de 7% des coût dans les élevages -énergie, fourrage, nourriture animale- a été parallèle en effet à la chute du prix du litre.
Une vrai ruine, selon la BDM, qui a donc décidé de prendre le taureau par les cornes. La fédération rassemble 30 000 des 110000 producteurs de laits allemands environ. Ils produisent 35 000 des 75 000 tonnes de lait livrées chaque jour. Elle revendique un prix de vente de base de 40 cent le litre aujourd'hui, « indispensable » pour que les exploitations survivent.
. La BDM s'insurge également contre le prix de vente du litre de lait qui arrive à 61 cent "au moins", dans les rayons, après voir été acheté 26 à la ferme.
Le croquis ci-dessous donne une idée de la répartition des coûts (livraison, traitement, emballage, stockage...).
Les producteurs de lait redoutent au fond les « menaces » de Lars Hoelgaard, représentant de la commission européenne, le 13 février à Bruxelles. Face à leur revendication d'un « juste prix » de vente du litre, il leur conseilla de rentabiliser leur production. «Si vous n'êtes pas capables de produire à 28 cent le litre, d'autres le feront ». Si on ne produit plus le lait dans notre pays, on l'importera comme le pétrole traduisent les paysans bavarois.
Une crainte qui, fondée ou non, résume les craintes des campagnes à l'égard de la globalisation.
80% des producteurs seraient dans le mouvement assure Romuald Schaber, président de la BDM qui prédit que les rayons des supermarchés manqueront bientôt de lait et de yaourts. Une menace qui n'impressionne pas Michael Brandl responsable de la fédération des industries du lait. « Cela signifierait que plus de 90 000 paysans suivraient le mouvement. Une blague! Et puis en cas de besoin les laiteries s'approvisionneront sur le marché européen. »
La BDM appelle donc les producteurs de lait des pays voisins à empêcher les laiteries allemandes de briser le mouvement en s'approvisionnant chez eux. La fédération fait en même temps le bras de fer avec la puissante fédération des paysans allemands, qui « laisse tomber » les producteurs de lait, selon la BDM. La grève du lait est aussi une lutte d'influence dans les campagnes.
Face aux industriels du lait les producteurs ne font guère le poids. Les super-marchés allemands, Aldi, Lidl, Edeka contrôlent 50% du marché. Les cinq plus gros industriels laitiers 50% de la distribution. Selon la fédération des industries du lait la chute des livraisons représentait seulement de 5 à 30% des besoins des laiteries mardi. Mais « Un boycott de 50% durant une semaine rendrait difficile l'approvisionnement en lait frais, reconnaît Eckard Heuser, porte parole des industriels ». Industriels et paysans ont décidé de nouer le contact pour sortir du conflit, et devraient se rencontrer ce dimanche soir à Berlin.
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