Lidl, Airbus, Deutsche Bahn, Deutsche Telekom, les salariés espionnés.

Depuis des mois les scandales d'espionnage des salariés et d'utilisation frauduleuse de leurs données personnelles se succèdent sans répit. Et il suffit parfois de se baisser pour en ramasser les preuves. Avant d'aller faire sa partie de tennis hebdomadaire, Regina Schulze s'était arrêtée dans un station service de Bochum, dans la Ruhr, pour laver sa voiture. En vidant son coffre, elle trouve dans la poubelle de la station un tas de formulaires, déposés là par un client précédent. Repérant le sigle de Lidl, elle prend, intriguée, quelque dizaines de formulaires pour les examiner de près. Ils contiennent notamment un mini-dossier médical de salariés de la chaine de magasins Discount: « veut un enfant, échec de la fécondation artificielle », « suit un traitement en psychothérapie », « opération d'une tumeur sans gravité».
Choquée, elle contacte l'hebdomadaire de Hambourg, der Spiegel, qui lui demande de retourner vider intégralement la poubelle. Après inventaire des centaines de pages récupérée on s'apercevra qu'ils concernent plus de six cent salariés, dont les données personnelles ont ainsi été balancés au quatre vent, maladies y compris de la grippe aux excès de tension, et opérations diverses. Toutes données datant de moins d'un an. Or en mars 2008 le groupe de magasins discount s'était déjà fait repérer pour l'espionnage systématique d'employés par des détectives privés qui relevaient scrupuleusement leurs habitudes, leurs problèmes familiaux et financiers. Les services fédéraux de protection des données personnelles avaient alors instruit une enquête. Et en septembre dernier le roi du Discount était condamné a 1,5 million d'amendes. En pure perte, semble-t-il. Cette fois le groupe vient de licencier son directeur pour l'Allemagne Frank Michaël Mros, mais cela mettre-t-il un terme aux scandales?

Selon Claudia Roth, présidente du parti Vert: « L'Allemagne est devenue le Far west de la protection des données personnelles. Les autorités et les entrepreneurs s'estiment au dessus des lois ». « Nous avons besoin d'un état de droit qui garantisse la protection des données des salariés, renchérit Gisela Piltz, porte parole du groupe parlementaire du parti libéral, et permette que les fauteurs soient sévèrement punis. Même la lutte contre la corruption qui sert en général de prétexte aux employeurs ne doit pas rendre le salarié transparent. »
Car de Lidl aux Telecoms en passant par la Deutsche Bahn et Airbus, l'espionnage des employés n'a pas de frontière.

On apprenait ainsi la semaine dernière qu'Airbus Allemagne avait effectué en 2007 des croisements de données des numéros de compte bancaires de ses 22000 salariés avec ceux des fournisseurs de l'entreprise, dans le cadre d'un audit de l'entreprise. Les représentants du personnel n'ont été informé de cette démarche qu'en 2008, après la nomination de Joachim Sauer à la tête des services du personnel de l'entreprise. Or selon les accords en vigueur dans l'entreprise depuis 1997, les représentants des salariés auraient dû « être informé à l'avance de ces démarches auxquelles ils devaient donner leur accord, explique Rüdiger Lütjen, président du conseil d'entreprise, qui vient d'entreprendre des poursuites judiciaires. Le vice-président des services de protection des données personnelles de Hambourg, ou se situe le principal site du groupe aéronautique, Hans-Joachim Menzel, souligne que la procédure n'est pas correcte. Si les « comparaisons de données bancaires peuvent être compréhensibles dans le cadre de la lutte contre la corruption, elles doivent s'appuyer sur des faits ». Il est impossible qu'elles soient ainsi systématiques. Et il serait nécessaire aujourd'hui de préciser « à partir de quels critères juridiques elles peuvent être entreprises ».

En Attendant, les découvertes successives de la commission d'enquête sur les pratiques de la Deutsche Bahn à l'égard des données de ses employés ont contraint fin mars le président Hartmut Mehdorn -un ancien d'Airbus- à la démission. Les comptes bancaires des 173000 salariés avaient été eux aussi croisés avec ceux des 80000 sociétés partenaires de la DB, dans le cadre de la lutte anti-corruption. L'entreprise filtrait par ailleurs systématiquement les e-mail transitant pas ses services, n'épargnant ni les syndicats, dont certains mails étaient détruits avant qu'ils ne parviennent à leur destinataires, ni les journalistes, parlementaires ou experts spécialistes des transports. Un millier de responsables de la compagnie étaient particulièrement « sous surveillance ». Au nom de la lutte contre la corruption, la Deutsche Bahn voulait en fait démasquer tout critique en son sein, et repérer ses contacts.

Précurseur, Deutsche Telekom avait de son côté placé membres du conseil de surveillance du groupe, dirigeants et syndicalistes sous écoute en 2005-2006. Et selon les dernières révélations du quotidien de Francfort « Frankfurter Runschau », le Konzern des télécommunications aurait même permis aux services de la police criminels d'utiliser les données de millions de ses abonnées au lendemain du 11 septembre 2001, dans la recherche de réseaux terroristes «  dormants ». Une assertion que dément la police criminelle. Qui croire direz vous?

Mon billet reprend en partie un article écrit le 7 avril pour La Croix.

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