Derniers jours paisibles à Stuttgart pour Martin Sandberger, criminel de guerre nazi
Par Michel Verrier, lundi 5 avril 2010 à 16:22 :: Mémoire :: permalien #152
"Que faire avec une personne de ce genre, s'interroge-t-il? La chasser, porter plainte, la contraindre à parler". Mais il redoute les suites de la découverte de Sandberger pour l'Augustinum et ses 730 pensionnaires. "Comment expliquer que cet homme qui a bestialement fait exterminer des milliers de victimes ait fini ses jours, paisible, dans l'une des meilleurs maisons de retraite de la République fédérale."
Qu'il ait bénéficié de tous les soins et de toutes les attentions possibles après avoir été "pardonné" pour des crimes moralement impardonnables". Le quotidien de Stuttgart signale par ailleurs que Sandberger était recensé dans comme espion dans les dossiers du FBI et de la CIA.
Sandberger fut jugé à Nüremberg et condamné à être pendu en septembre 1947.
«C’est l’un des membres de cette bande de meurtriers qui ont tué des centaines de milliers d’innocents. Il avait bien mérité la peine de mort, estime toujours l’un des procureurs». Mais sa peine sera commuée en prison à vie, et il sera libéré au bout de sept ans de prison.
Son père, ex-dirigeant du trust chimique IG Farben, serait intervenu personnellement auprès du président allemand de l’époque, Theodor Heuss.
Sandberger fera jouer ses relations d'avant guerre, dans les milieux économiques et religieux. Un sénateur américain interviendra en sa faveur «Il disparaîtra ensuite sans laisser de trace», commente l’hebdomadaire der Spiegel.
Il rejoindra en fait, en sortant de prison, le groupe industriel Lechler GMBH en tant que juriste. En 1972, à la suite de plaintes de familles juives, la justice estimera son cas réglé par le jugement américain de 1948 et n’entamera pas de poursuites -l’avocat de Sandberger de l’époque fut également le défenseur de Josef Mengele, le «médecin" des camps de la mort. La chute du mur et l’ouverture des archives de l’Europe de l’est relanceront les recherches d’historiens sur le rôle du «plus grand nazi d’Estonie». En Allemagne ce sera le «silence radio». Jusqu’aux révélations du journaliste de der Spiegel cette semaine.
Les preuves de sa culpabilité abondent pourtant, à l’inverse du cas de John Demjanjuk, cet Ukrainien ex-soldat de l’armée rouge, accusé d’avoir été gardien sous les ordres des SS au camp d’extermination de Sobibor et dont le procès de déroule actuellement à Münich. Le procès Demjanjuk est censé prouver que la justice ne renonce pas à poursuivre les criminels nazis, quel que soit leur âge, jusqu'au dernier.
Sandberger, à l’inverse de Demjanjuk, n’était pas un rouage de la machine d’extermination, il appartenait à l"élite» nazie. Ceux qui inventèrent le concept, construisirent et dirigèrent l’appareil qui rendit l’élimination de millions de victimes possible.
Qu’il ait vécu paisiblement sa retraite, confortera ceux qui regardent avec scepticisme le procès Demjanjuk -dont la culpabilité, probable, reste à prouver.
En ce qui concerne Sandberger il n’existe aucun doute. Mais les autorités judiciaires allemandes qui ont remué -tardivement- ciel et terre pour faire extrader l’Ukrainien des USA n’ont jamais cherché sérieusement à rouvrir le procès de l’Allemand Martin Sandberger.
A écouter (en allemand). Michael Wildt, biographie Martin Sandberger, étudiant et membre de la SA. Le nazisme à l'université de Tübingen.
Commentaires
Aucun commentaire pour le moment.
:: Fil rss des commentaires de ce billet ::
Ajouter un commentaire