Les mystères de la bactérie fatale
Par Michel Verrier, vendredi 3 juin 2011 à 15:09 :: société :: permalien #234
A Hambourg l'épicentre de l'épidémie la situation est grave. « 102 patients atteints du syndrome sont en traitement, dont 27 enfants et cinq femmes enceinte, soulignait hier le professeur Jörg Debatin, chef de la clinique universitaire Hamburg-Eppendorf.« La tendance à la décroissance de l'infection que nous espérions en début de semaine ne s'est malheureusement pas confirmée.» L'évolution de la maladie surprend les praticiens. « Les troubles peuvent atteindre le cerveau deux ou trois jours après le début du syndrome, explique Hendrick Lehnert, le directeur de la clinique médicale universitaire de Kiel -proche de Hambourg-, provoquant des maux de têtes, des difficultés de la parole, voire des crises d'épilepsie.
La lecture du génome est pour l'instant sans conséquence et les médecins sont débordés. On compte déjà sept fois plus de cas de patients atteints du syndrome en un mois qu'en une année! Les donneurs de sang sont sollicités d'urgence. Les transfusions de plasma répétées sont le premier remède pour éliminer le poison. Les antibiotiques sont impuissants face à l'infection, car la destruction d'une bactérie délivre le poison qu'elle produit et se répand dans le sang, aggravant encore le mal.
Si le mal résiste les médecins testent une thérapie tout juste découverte par le professeur Franz Schaeffer et basée sur l'Eculizumab, médicament couteux, destiné à lutter contre une autre infection atypique. Il a sauvé des malades qui semblaient condamnés, mais rien ne dit qu'il soit le « remède miracle » attendu (voir mon billet précédent, "l'Allemagne en quête de remède miracle"). Le mystère de la contamination reste par ailleurs entier. La bactérie Ehec se développe dans le système digestif des bovins, mais le type de bactérie issue d'un croisement dont le code génétique vient d'être décodé n'a jamais été détecté chez un ruminant en Allemagne, souligne un spécialiste (voir ma revue de presse). Comment a-t-elle pu se retrouver dans les tomates, les salades, les concombres, qui seraient à l'origine de l'épidémie et sont aujourd'hui quasi « interdits »?
La bactérie détectée dans des concombres espagnols mis en cause par les Allemands en fin de semaine dernière n'était pas l'E.coli coupable. L'Espagne est furieuse. Le premier ministre Zapatero accuse Berlin et l'Union européenne de « faillite » face à l'épidémie. 150 000 tonnes de produits espagnols resteraient invendus, les paysans auraient déjà subi une perte de 200 millions d'euros!
Ce billet reprend un article écrit pour la Tribune de Genève.
Commentaires
Aucun commentaire pour le moment.
:: Fil rss des commentaires de ce billet ::
Ajouter un commentaire