lundi 16 novembre 2009
Sigmar Gabriel s'engage à ranimer un SPD en coma profond
C'est une « débâcle effrayante » selon les termes du président sortant, Franz Müntefering, qui sera ovationné debout, longuement, après son discours d'adieu. Les quatre premiers intervenant, prenant immédiatement la parole après lui, réduiront pourtant à un tas de décombres la politique qu'il incarne, depuis l'élection de Schröder en 1998, avec Franck Walter Steinmeier. Le candidat chancelier malheureux du SPD face à Angela Merkel, en septembre dernier, est aujourd'hui président du groupe parlementaire social démocrate au Bundestag, Porte-parole de l'opposition au nouveau gouvernement d'Angela Merkel, ils est en quelque sorte numéro deux du parti,
Le premier orateur, un bavarois, assénera qu'il existe deux mondes au SPD. Celui de la direction du parti qui décide de la politique et celui de la base qui en fait les frais. Il en va ainsi de la réforme dite « Harz IV » par exemple, qui a réduit considérablement les prestations des chômeurs. Bilan de la distance qui sépare ces deux planètes: en dix ans de gouvernement, le SPD a perdu la moitié de ses électeurs et 400000 membres.
Le second orateur, un bavarois lui aussi, soulignera que le parti a perdu toute culture associant ses membres à l'élaboration de sa politique. Tandis que le troisième, venu de Rhénanie du nord, député au Bundestag, décrira des dirigeants incapables de s'apercevoir qu'ils se trompent et de redresser la barre avant d'aller droit au mur.
Quatrième intervenante, Ursula Engelin-kiefer, porte-parole respectée du mouvement syndical, finira de planter le décor d'un parti en ruine en retraçant comment le SPD s'est « distancié des travailleurs » dont il se dit le porte parole. Perdant ainsi leurs suffrages. La réforme de la retraite à soixante sept ans, impulsée par Müntefering alors ministre du travail du gouvernement Merkel, aura été, selon elle, le coup fatal.
Les intervenants qui se succédèrent ensuite reprirent en grande majorité ces reproches.
On avait parfois l'impression d'entendre mot pour mot les critiques qu'adresse Oskar Lafontaine à la politique de son ancien parti! Ceux qui tentèrent de faire la part des choses, de tirer un bilan plutôt positif de la politique gouvernementale du SPD depuis Schröder argumentaient essentiellement sur trois points. La crise et les défaites des sociaux-démocrates sont un phénomène européen.
Les électeurs qui se sont détournés du SPD ont aussi bien voté à droite, pour la CDU et le FDP, qu'à gauche pour die Linke.
Les mesures prises par l'ex chancelier Schröder pour la réforme du marché du travail visaient à relancer l'emploi et y sont parvenues, en partie au moins.
Franck-Walter Steinmeier, interrogé par la presse, reprendra quant à lui, imperturbable, la défense de la politique dont il fut l'un des auteurs et l'un des concepteurs aux côtés de Gerhard Schröder. Ignorant avec superbe la litanie des critiques des délégués de la base de son propre parti.
Dans son discours d'intronisation, Sigmar Gabriel devait conquérir lui les délégués du congrès, qui devaient l'élire ensuite au poste de président du SPD. Il ne pouvait donc en aucun cas faire la sourde oreille à leurs critiques.
Il a donc voulu démonter définitivement le mécanisme qui a enclenché la débâcle du parti social-démocrate, faisant un sort au « nouveau centre », le « neue Mitte », cher au chancelier Schröder, et dont la conquête lui aurait permis de vaincre Helmut Kohl.
Un centre sociologiquement inexistant, selon Gabriel, et dont la quête a conduit le SPD à rogner les angles de son programme social, pour ne pas effrayer le « neue Mitte » justement.
Le parti a ainsi affadi son programme, mis de l'eau dans son vin pourrait on dire. Et au lieu de conquérir l'hypothétique « neue Mitte », de le convaincre avec des idées de gauche, le SPD a perdu une bonne part de sa base dans les rangs des salariés, sans rien conquérir de stable « au centre ». Un bilan qui ne manque pas de pertinence.
Pour remonter la pente, estime Gabriel, le SPD devra convaincre à nouveau que le concours de tous, à fortiori de ceux qui vivent mieux que les autres, « chacun à la mesure de ses moyens», est indispensable pour tisser la solidarité nécessaire au bien être de chacun. Il devra reconquérir l'opinion au centre à partir de la gauche.
Un discours qui donnera aussitôt des ailes aux « Jusos », les jeunes du SPD, qui feront adopter avec une majorité écrasante par le congrès un texte en faveur de la « ré-instauration de l'impôt sur la fortune »!
Un amendement que la direction du parti souhaitait éviter justement, Franck Walter Steinmeier en tête. Et qu'elle devra finalement accepter, à contre-coeur. Mais « l'incident » est plus que révélateur alors que Sigmar Gabriel s'est engagé à démontrer aux électeurs que le « nouveau » SPD n'est plus celui qui les a déçu.
Voir également ma revue de presse, changement de capitaine sur le pont du SPD.