mercredi 31 décembre 2008
Une tonne de feu d'artifice | Bach, la musique et la touche protestante | Freddie Hubard, une trompette à réchauffer l'hiver
Johan Sebastian Bach aurait il écrit la musique autrement s'il avait été catholique au lieu d'être protestant? C'est une question « très intéressante », pour Hélène Grimaud, interviewée dans le Frankfurter Rundschau, à propos de la sortie de son dernier enregistrement. Des oeuvres de Bach justement. Et la réponse est très difficile estime la pianiste. On dirait plutôt spontanément qu'il n'aurait pas composé autrement. En fait il aurait fait une musique différente, s'il avait été catholique -Bach a été pendant plus de deux décennies le chef des choeurs et de la musique des églises de Leipzig. On ne peut pas faire abstraction de l'origine et des croyances d'un créateur, résume-t-elle. Elles l'imprègnent. Avant d'expliquer qu'elle même, dont les parents étaient d'origine juive et catholique est d'éducation totalement laïque. La religion n'ayant eu aucune influence sur ses valeurs morales, éthiques. La pianiste retourne ensuite la question à l'adresse de l'interwiewer. Celui-ci signale qu'il est lui d'origine catholique, non-pratiquant. Il assure que la musique d'un Bach catholique aurait été tout autre, selon lui, en effet. Prenez Beethoven précise-t-il, on entend le catholique à chaque mesure. Un protestant ne s'exprimerait pas si abruptement. Beethoven discute les choses, Bach les laisse couler. Il dit en quelque sorte: voilà c'est mon idée de la vie, mon sentiment, disposez en comme bon vous semble. « C'est peut être là la différence entre compositeur catholique et protestant. » Quoiqu'on en pense, ce sont là des réflexions intéressantes.
Hélène Grimaud au piano...
Hélène Grimaud donne de son côté un coup de chapeau à Glenn Gould, ce pianiste-compositeur canadien qui révolutionna la manière de jouer Bach. Avec « une énergie vitale, quelque chose d'animal, de grognon, un souffle humain », sans pareil. Elle rend hommage au « courage », du pianiste qui l'a délivrée de tout les dogmes, de tous les clichés éculés que trimballe Bach, le « commencement de la musique », une « bible à lui seul ». Tout ce qui avait stérilisé l'oeuvre du compositeur de Leipzig. Ce silence, cette lumière, ce secret, cette façon de joindre l'humain et l'éternel.
Glenn Gould joue Bach.
Le quotidien de Hambourg, le Hamburger Abendblatt, dédie lui un article qui fait chaud au coeur à Freddie Hubbard, trompettiste, qui vient de mourir. "Il avait un son, un style sans pareil, un peu de la grandeur laconique de Miles Davis et du tempérament débordant et aiguisé comme un rasoir de Clifford Brown, liés à la joie de vivre de Louis Armstrong, et à la folie de Dizzy Gillespie." Freddie Hubbard joua avec tous les géants du jazz, Eric Dolphy, Coltrane, Sonny Rollins, Ornette Coleman. C'était un des grands de cette « musique classique » de l'autre côté de l'Atlantique qu'est le jazz. Un critique disait de l'album « Ascension » qu'il enregistra avec Coleman que c'était: "une musique capable de chauffer les appartements en hiver". C'est le moment.
Night in Tunisia (1992), avec Freddie Hubard