Karl-Theodor zu Guttenberg et la chute d'Icare |
mercredi 2 mars 2011 à 14:15 - permalien #821
Guttenberg plus rapide que Kadhafi, la Une provocatrice du Tageszeitung
Karl-Theodor Maria Nikolaus Johann Jakob Philipp Franz Joseph Sylvester Freiherr (baron) von und zu Guttenberg, le Berliner Zeitung cite son nom au complet, monopolise évidemment les pages d'ouverture et les unes de la presse ce matin. « Il a longuement expliqué les raisons de sa démission souligne le quotidien berlinois. Et ce qu'il en pense se lit entre les lignes : ce n'est pas moi ce sont les autres qui sont coupables. »
« KTG quitte l'arène politique comme il y est entré en assurant être différent des autres responsables politiques. C'est le dernier salut du gladiateur qui s'est battu avec vaillance jusqu'au bout. KTG oublie simplement d'évoquer que c'est sur sa propre épée qu'il s'est empalé. »
Le philosophe Richard David Precht se félicite lui dans le quotidien berlinois, de ce que la pression venue des milieu universitaire, relayée par la presse de qualité contre la presse boulevard, l'aie finalement emporté en imposant à KTG sa démission, « les médias ont joué leur rôle de correcteurs de la politique ».
Internet, est-il donc devenu le 5 ème pouvoir ? Il est certain que le réseau et les réactions collectives telles que la création du site Guttenplag-Wiki font partie des facteurs décisifs qui on conduit zu Guttenberg à démissionner. Mais cela n'aurait pas fonctionné sans les aller et retour entre le 5è et le 4è pouvoir -la presse-, souligne Markus Beckerdahl, activiste du net berlinois. « Internet aide la presse à contrôler l'état, le gouvernement, l'administration. C'est un grand pas en avant du point de vue démocratique. »
« Guttenberg plus rapide que Kadhafi », titre le Tageszeitung, qui souligne que « depuis hier bien des choses ont changé en Allemagne ». Guttenberg n'est plus qu'une histoire et la chancelière a perdu beaucoup de sa crédibilité.
« Elle a tenté d'utiliser à son profit la popularité de son jeune ministre bavarois. En tant qu'universitaire, épouse d'un chercheur de renom elle aurait du savoir qu'on ne peut faire d'un universitaire ayant perdu toute crédibilité un dirigeant politique fédéral hors du commun ». En faisant fi ainsi des valeurs conservatrices et de la responsabilité morale elle a brouillé l'image de la CDU. La société civile quant a elle a écrit « une page historique ». La mobilisation sur internet a montré sa force également en Allemagne.
Et Springer, l'éditeur de Bild Zeitung, le quotidien populaire qui soutenait Guttenberg, n'a rien pu contre cette vague de protestation.
« Guttenberg est parti mais rien n'est fini pour autant souligne le Tagesspiegel. Pour Merkel c'est une débâcle, le ministre de la défense à laissé un tas de décombres dont il n'a plus à se soucier. La charge en revient à la chancelière ».
Le quotidien berlinois illustre sa page trois de photos d'Angela Merkel recevant à l'inauguration du Cebit à Hanovre un SMS l'informant de la démission de son ministre de la défense. Elle montre avec un léger sourire le texte à Anette Schavan, la ministre de la recherche qui est à ses côtés et avait désavoué vertement zu Guttenberg il y a quelques jours. « Elle s'y attendait probablement. Seul le moment est peut être une surprise. Elle a un problème de moins, mais fait face maintenant à un nouveau problème de plus».
« L'union chrétienne peut souffler » estime au contraire Heribert Pantl, commentateur du Süddeutsche Zeitung (édition papier). Cette démission est un soulagement pour la CDU. L'épreuve des dissensions entre les pro et les contre Guttenberg lui est épargnée. Le ministre de la défense donne à Merkel l'occasion de reconstituer son cabinet en profondeur et permet à la CDU de se débarrasser d'une dangereuse "Guttenbergmania" à la veille d'élections décisives dans les Länder.
La démission de Guttenberg est dommageable mais Angela Merkel a sans doute provoqué l'essentiel des dégâts à long terme en le protégeant contre la communauté scientifique en protégeant Guttenberg. « Ses justifications selon lesquelles elle n'avait pas besoin d'un assistant scientifique, mais d'un ministre de la défense, resteront un symbole de son style de gouvernement, machiavélique.
Le Bild Zeitung (édition papier) regrette lui, ce n'est pas une surprise, le départ du ministre. « C'est la décision la plus douloureuse de ma vie », le billet quotidien de J.F Wagner s'ouvre sur ces mots de zu Guttenberg. Il poursuit: "je n'aurais pas démissionné à votre place".
Ce sont les petits esprits, les envieux, les politiques sans envergures de son parti qui ont laissé tomber Guttenberg. Pas la chancelière, souligne Kai Diekmann , le rédacteur en chef du quotidien populaire. Les Verts en leur temps avaient fait front aux côtés de Joschka Fischer accusé d'avoir été dans sa jeunesse un spécialiste des agressions contre les policiers. Comme le SPD avait soutenu le ministre président du Brandenbourg, Manfred Stolpe, accusè d'avoir travaillé pour la Stasi.
« Le peuple était prêt dans sa grande majorité à soutenir Guttenberg. Parce qu'il émerveillait, et avait redonné pour beaucoup de gens un sens à la politique. Et qui voit dans son retrait une mesure de purification des moeurs politique se trompe. Elle marquera une césure, dans l'éloignement croissant entre les gouvernants et les gouvernés, le peuple et la politique. Et quant une démocratie représentative s'écarte trop des gens, les gens, un jour ou l'autre, s'éloignent de la démocratie.
Icare, c'est ainsi que le Frankfurter Allgemeine Zeitung décrit zu Guttenberg aujourd'hui. L'Icare de la politique allemande ne pouvait plus tenir l'air. Il se serait épargné s'il avait compris cela un peu plus tôt, ainsi que ceux qui lui conseillaient de rester. Qui attribue la faute de sa chute à une trahison aux motifs obscurs pour liquider un brillant éclaireur, se fait plaisir. « Guttenberg est tombé parce qu'il n'était pas infaillible contrairement à ce que croyaient tous ceux qui s'accrochent encore à leur certitude après la preuve du contraire. »
Commentaires
Aucun commentaire pour le moment.
:: Fil rss des commentaires de ce billet ::
Ajouter un commentaire