Le 11 septembre du nucléaire |
mardi 15 mars 2011 à 14:59 - permalien #832
« Un gouvernement n'avait jamais remis en cause avec une telle évidence un projet pour lequel il se battait il y a encore quelques mois. Il faut espérer que le débat ne sera plus le même avant et après le moratoire, comme l'a souligné la chancelière.
Car les critères de sécurité actuellement en vigueur, n'ont pas empêché le laxisme des années durant. La centrale de Biblis par exemple doit être l'objet depuis des années de travaux de modernisation urgents qui n'ont jamais été réalisés, sans conséquences pour son exploitant, RWE.
« Si la manoeuvre du gouvernement est autre chose qu'une simple tactique pour gagner du temps à la veille de trois élections régionales difficiles l'Allemagne devrait compter bientôt sept centrales nucléaires de moins, particulièrement exposées aux incidents en raison de leur construction. Les parois de leurs enceintes de confinement sont trop fragiles pour résister à un attentat terroriste aérien. Cet aspect évoqué à l'origine dans la loi de prolongement de la durée de fonctionnement des centrales, avait disparu ensuite.
La coalition noir-jaune fait à nouveau face au débat sur la place de l'atome dans les ressources énergétiques qu'elle avait clôt avec peine cet automne. Mais l'argument de la sécurité devrait maintenant prendre le pas sur celui de la rentabilité. Ce fut trop souvent l'inverse, jusqu'ici. »
Le Frankfurter Rundschau consacre lui vingt pages aux suites de Fukushima. « L'Allemagne a vécu hier une métamorphose, le gouvernement noir-jaune est devenu quasi en une nuit un critique de l'énergie atomique. Il tenait encore il y a quelques semaines les centrales même les plus vieilles pour absolument sûres et les angoisses des anti-nucléaires pour irrationnelles ».
Mais qui croyait encore que Tchernobyl tenait à la bêtise des Ukrainiens ou à une construction défaillante ? Au japon après un tremblement de terre et un tsunami c'est une pompe qui a lâché. Un de ces systèmes techniques supposé infaillible, qui peut avoir bien d'autres causes de défaillance, en dehors d'un tsunami.
« Le gouvernement a mis en garde contre une exploitation politique de la catastrophe immédiatement après le drame. » Puis la chancelière s'est rendu compte de l'impasse, à la veille de deux élections clés dans les Länder, alors que les Allemands avaient les yeux tournés vers le Japon.
« Elle a raison de dire qu'après le moratoire plus rien ne sera comme avant. » Après trois jours de télévision, les citoyens savent à peu près tout ce qu'il faut savoir, des systèmes de refroidissement aux nuages radio-actifs. Et le japon est beaucoup plus proche de l'Allemagne que ne l'était la Russie de Tchernobyl.
« Une fenêtre s'est ouverte pour tous les partisans d'une sortie rapide de l'atome, aussi cynique et partisan que cela puisse paraître. Quant un gouvernement désorienté et angoissé évolue dans ce sens, quand les plus anciennes centrales vont être fermées, tout cela va dans le bon sens. » Mais la sortie de l'atome ne règle pas son remplacement, « la chancelière a raison sur ce point ». « Les énergies renouvelables ont leur prix politique en terme d'aménagement de l'environnement, de construction des réseaux de distribution de parcs d'éoliennes et de terrains occupés par les miroirs solaires, rien de très beau. L'efficacité énergétique a ses contraintes. Il faut accepter d'en payer le prix lorsque l'on est effrayé par la catastrophe apocalyptique que vit le japon. »
L'Allemagne estime depuis longtemps que l'énergie nucléaire est une impasse. On ne mène plus sur ce terrain que des combats d'arrière garde, depuis 25 ans, note le Frankfurter Allgemeine Zeitung. Rarement plus de 50% des Allemands sont favorables au nucléaire. 80% se prononcent en faveur dies énergies renouvelables depuis les années quatre vingt dix. Depuis Tchernobyl les outrances idéologiques et les diabolisations morales sont le quotidien du débat sur l'atome en Allemagne, ou l'on ne remarque même pas que personne n'est mort depuis dans les 450 centrales de par le monde, alors que des milliers de mineurs ont perdu la vie.
« Les physiciens allemands cumulaient les prix nobels dans la première moitié du 20è siècle, ils furent des pionniers de la sécurité des centrales dans le second. On collait l'étiquette « mafia de l'atome », aux exploitants des centrales avant la fin du siècle, les Verts et le SPD les accusant de manoeuvres criminelles. Il est très risqué pour un responsable politique d'être d'accord avec les Konzern' de l'énergie. »
Les centrales devaient pouvoir fonctionner quelques années supplémentaires, mais elles ne devaient pas être remplacées : tel est le marché qui devait rapporter des milliards au budget de l'état, aux énergies renouvelables et aux exploitants des centrales et qui vient de capoter.
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