Ambiance pour la visite d'Obama à Berlin | Karlsruhe et la politique de la BCE: "faudra-t-il soumettre Draghi à la torture"
mercredi 12 juin 2013 à 15:10 - permalien #1339
« Il est rare que les jugements de la cour constitutionnelle soient ainsi démentis par la réalité, note le Berliner Zeitung. » Celle-ci a jugé en effet en 1983 que les individus sont maitres de l'utilisation et de la mise en valeur de leurs données personnelles. Un droit qui a sans cesse été entamé au cours des dernières décennies, déchainant les critiques des politiques attachés au droit et l'humour des commentateurs.
Le gouvernement fédéral n'en est pas moins responsable de la protection de ses citoyens et doit interdire que le territoire soit transformé par les services secrets américains en zone libre d'accès, sans réserve. « Obama justifie le vol de données par ses services secrets à l'aide de la loi américaine. Lors de sa rencontre avec le président US, la chancelière devrait, et même plus elle est obligé de lui signifier les exigences du droit allemand, code pénal à l'appui. »
Quand le seul secret que protège un état est celui de « l'espionnage de tous les secrets de ses citoyens, ce n'est plus la liberté mais le totalitarisme qui règne ». Obama -ancien juriste constitutionnel- l'a visiblement oublié. Mais pas le jeune spécialiste d'Internet, Edward Snowden.
« Aux yeux des autorités US il peut passer pour un criminel. Mais l'espoir en une société démocratique repose sur des gens comme lui. »
« Le Bundestag devra-il menacer de soumettre le président de la BCE Draghi à la torture, s'il ne tient pas compte d'un jugement éventuel de la cour constitutionnelle allemande mettant en cause sa politique de rachat sur le second marché d'obligations d'états en crise (OMT) afin de faire baisser les taux d'intérêts excessifs auxquels ces derniers doivent faire face, s'interroge le juge du tribunal constitutionnel Peter Müller (ex ministre président CDU de la Sarre), dont les propos sont rapportés par le Frankfurter Allgemeine Zeitung.
Selon les plaignants qui ont eu recours au tribunal de Karlsruhe et étaient entendus hier et aujourd'hui par la cour, il s'agit là d'une politique contraire au statut de la BCE, qui doit uniquement se consacrer à la stabilité de l'euro et non pas venir en aide aux états qui peinent à redresser leurs budgets et maitriser leurs dettes.
Le président de la cour constitutionnelle, Andreas Voßkuhle, reconnaît certes que les juges ne peuvent juger de la justesse ou non de la politique économique de la BCE. Celle-ci a été défendue bec et ongle à Karlsruhe par Jörg Asmüssen, directeur adjoint de la BCE, et ancien secrétaire d'état au ministère des finances. Il faisait face à son « frère ennemi », Jens Weidmann, président de la Bundesbank, ex-conseiller de la chancelière, et hostile à la politique de la BCE.
Que les mesures prises aient été positives ou non ne doit pas influer non plus sur le jugement du tribunal de Karlsruhe. Cela reviendrait à reconnaitre en effet que la « fin justifie les moyens » assure Voßkühle.
Pourtant, le programme de rachat d'obligations décidé par la BCE a « fait l'effet d'une arme magique contre la crise, reconnaît Spiegel on line. Le simple fait qu'il ait été rendu public a suffit a ramener le calme sur les marchés financiers. »
Même ses adversaires le reconnaissent, « l'OMT est la mesure la plus efficace mise en œuvre jusqu'ici pour la sauvegarde de l'euro », reconnaît Dietrich Murswiek, avocat du député de la CSU bavaroise Peter Gauweiler, l'un des principaux plaignants auprès de Karlsruhe .
« Reste que ce programme est probablement inconstitutionnel poursuit der Spiegel et qu'il faut beaucoup d'imagination pour ne pas y voir une politique financière en faveur des états en crise. Au fond le dilemme que doit trancher Karlsruhe est le suivant: « le pragmatisme politique passe-t-il avant les contraintes légales strictes ».
Mais que se passerait-il si les tribunaux des pays membres de la zone euro, à l'exemple de l'Allemagne, se mettaient à juger de la justesse de la politique de la banque centrale européenne, émettant éventuellement à ce propos des jugements contraires. Que devrait faire la banque ? Et que fera la Bundestag si la BCE ignore le jugement de la cour constitutionnel de Karlsruhe -estimant notamment que le parlement allemand doit avoir le dernier mot à dire sur les mesures économiques mises en œuvre dans la zone euro?
«Le tribunal constitutionnel n'a pas le mandat de contraindre la BCE à suivre une politique particulière, ou à mettre fin à l'euro, note le Frankfurter Allgemeine. Mais il est autorisé à rappeler leurs limites, aux institutions européennes indépendantes, tels que la BCE, lorsqu'elles outrepassent leur droit au dépend des citoyens allemands - « ceux qui paient finalement la note », selon le président Voßkuhle.
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