Grèce, Merkel se passe de Hollande
Publié le jeudi 02 juillet 2015, 21:28 - modifié le 14/08/15 - franco-allemand - Lien permanent
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L’Allemagne et la France suivent-elles la même politique? C'était le cas jusqu'à mercredi précise le Tagesspiegl. Mais après les déclarations de Hollande selon lesquelles il faut chercher un accord immédiat avec Athènes, « le président français s'affiche beaucoup plus soucieux que la chancelière de répondre aux exigences de Tsipras ». Merkel a déclaré le même jour au Bundestag qu'il n'y aurait « pas de négociation possible avant le référendum de ce dimanche ». Un point de vu partagé par les ministres de l'eurogroupe. La chancelière a certes tenté de relativiser la divergence. Avec le renfort de Manuel Valls qui affirmait jeudi à Toulouse qu'il y a consultation permanente entre les deux partenaires du couple Franco-allemand .
La divergence pourtant n'est pas mineure et la dynamique de la crise grecque après le référendum pourrait encore l'exacerber. La chancelière a défendu au Bundestag une politique identique à celle de son ministre des finances, Wolgang Schäuble. Ssoutenue par son allié, Sigmar Gabriel, vice chancelier et président du SPD. Le Grexit ne serait pas un mal au fond pour la zone euro. La Grèce étant un boulet pour sa crédibilité. Un point de vue que partage aujourd'hui visiblement la majorité des membres de l'eurogroupe. Qu'il s'agisse des pays du nord ou de l'est qui suivent Berlin, ou des pays du sud dirigés par la droite tels que l'Espagne.
Dans ce contexte Merkel n'a plus besoin de Hollande contrairement à ce que soulignaient plusieurs observateurs la semaine dernière encore -voir mon billet à ce propos. Hollande se retrouve-t-il seul contre tous aujourd'hui? On aura remarqué au passage les déclarations de Sarkozy sur la Grèce. L'ex estime qu'Athènes s'est déjà mis en dehors de la zone euro en organisait le référendum de dimanche. Un rappel de Merkozy.
Pourtant "la politique actuelle est en train de détruire l'Europe". Ce n'est pas Hollande qui s'exprimait ainsi mercredi, mais Renzi, le premier ministre italien, dont les propos son rapportés par le Tagesspiegel. Il s'adressait ainsi aux auditeurs du cycle de conférence sur l'Europe de l'université de Humbold à Berlin. "Cette politique qui centre tout sur l'épargne n'a pas porté ses fruits ces dernières années, selon lui. Sauf pour l'Allemagne peut être, mais pas pour l'Europe." On peut en lire les résultats dans les statistiques. L'Europe devait devenir selon le traité de Lisbonne un modèle de compétitivité et de dynamisme pour la planète, "nous sommes en train de devenir au contraire le feu rouge".
Renzi n'en critique certes pas moins la stratégie de Tsipras. Mais il invite les Allemands à revoir leur politique et il serait bon que Berlin prenne sa mise en garde en compte. Car Renzi a également illustré son propos sur la politique européenne avec véhémence sur la question des réfugiés. Décrivant les réactions des pays membres de l'UE lors du dernier sommet européen comme "un festival d'égoïsme...qui aurait choqué les pères fondateurs de l'Union ». Merkel « rayonne au contraire d'autosatisfaction au Paradis », s'étonnait un commentateur de Spiegel on line. L'Europe est forte, « nous pouvons attendre tranquillement » le référendum de dimanche et les suites de la crise assurait la chancelière dans son discours au Bundestag. Attendre c'est la recette de Merkel en toute occasion. Malheureusement la chancelière se trompe énormément.
«Seuls ceux qui regardent égoïstement l'Europe sans aucune solidarité peuvent ne voir aucun problème quand un autre pays de la communauté est au bord du gouffre». Seuls ceux qui accordent peu d'importance à l'humanité et à la justice peuvent attendre tranquillement quand les états de l'Union « ne sont même pas capables de s'entendre sur un quota d'accueil des réfugiés », souligne le commentateur du Spiegel. Quand Merkel dit que l'Europe est forte elle signifie en fait « nous sommes assurés que les problèmes des autres ne vont pas nous concerner ». Les dernières publications de Wikileaks sur les écoutes de la chancelière par les services américains de la NSA sont un cruel éclairage des choix politique de la chancelière. Le quotidien Bild en publie les extraits révélant Les hésitations de Merkel quant aux solutions à mettre en œuvre face à la crise de la dette grecque dés l'origine. Angela Merkel reconnaît dans un échange avec l'un de ses proches collaborateurs être désemparée « sur la question de savoir quelle serait la meilleur option un nouvel effacement de la dette ou une union de transfert... ».
C'est finalement la solution de « l'ajustement », le mot clé de Wolfgang Schäuble synonyme d'équilibre budgétaire à tout prix, nécessitant une austérité à tout crin en tout lieu et tout temps qui l'a emporté. Les résultats sont là aujourd'hui . Mais c'est maintenant à la chimère du Grexit renforçant la zone euro que le ministre des finances allemand semble avoir converti la chancelière. Hollande et Renzi pour ne pas parler de Valls auront-t-ils la trempe de faire front à ces « apprentis-sorciers » selon l'expression de l'économiste T .Picketty.